J’entends, je lis et constate que, dans le cadre d’une vente immobilière, le « faire offre à partir de… » serait purement et simplement illégal.
Tout d’abord, il convient de préciser que le principe suivant lequel « il y a vente lorsqu’il y a accord sur la chose et le prix » demeure d’application et trouve son ancrage dans l’article 1583 du code civil belge.
Toutefois, l’évolution de la vente immobilière et de la jurisprudence ont été plus rapides que l’adaptation règlementaire qui devra, un jour, intervenir.
De manière résumée, il est désormais admis que l’annonce de mise en vente d’un bien, qu’elle émane du propriétaire et/ou d’un agent immobilier ne constitue pas une « offre de vente » mais un appel à obtenir des offres d’achat.
En clair, une annonce à laquelle répondrait un offrant en proposant le prix sollicité n’oblige pas le propriétaire à vendre !
La voie du faire offre à partir de… a donc été ouverte par les tribunaux de notre royaume.
Si la voie est ouverte, il n’en demeure pas moins que l’on ne peut l’emprunter en faisant « n’importe quoi » mais il ne faut pas confondre les genres.
« Le faire offre à partir de » ne doit, ni ne peut, être péremptoirement assimilé à une vente publique.
La vente publique demeure du ressort exclusif du Notariat, ce que nul ne peut contester.
Pour qu’une vente soit considérée comme publique, et donc, de la seule compétence du Notaire, il faut que trois critères cumulatifs soient présents :
- La réunion physique ou virtuelle d’un public-
- Le fait que lors de la vente, chaque participant ait connaissance de l’offre de l’autre-
- Qu’il soit, dès le départ, acquis que l’immeuble reviendra au plus offrant
Le premier critère ne justifie pas, dans le cadre de la présente contribution, un quelconque débat.
En effet, que l’on soit en vente publique ou en vente de gré à gré, il est stérile de vouloir différencier la réunion d’un public… selon les modalités publicitaires de la convocation.
Le deuxième critère (chacun a connaissance de l’offre de l’autre) peut être évité par le vendeur et/ou l’agent immobilier dès lors qu’il recueille des offres « sous enveloppes fermées ».
En ce cas, le faire offre ne s’assimile pas à la vente publique et est un moyen de commercialisation toléré par la jurisprudence qui voit dans l’annonce « un appel à obtenir des offres d’achat ».
Il n’en demeure pas moins que tant le vendeur que l’agent immobilier seront tentés de communiquer le montant des offres réalisées par les divers intervenants afin de créer une certaine « émulation » entre ces derniers…
Ce faisant, le deuxième critère est rempli et l’on se rapproche dangereusement du territoire réservé au Notariat et donc… de l’illégalité !
Reste donc le troisième critère.
Dans le cadre d’une vente publique, le bien immobilier ira au plus offrant. Pour être clair, chaque offre supérieure à la précédente chasse définitivement celle-ci (l’offre à 110.000 euros « chasse » celle de 100.000 euros). Le Notaire chargé de la vente publique assurera, sous son autorité, dans le respect des dispositions légales et du cahier des charges, la police de cette vente…
C’est là toute la différence, l’agent immobilier qui procèdera à une vente de gré à gré via le principe du faire offre ne pourra JAMAIS affirmer que l’immeuble ira directement au plus offrant, pas plus qu’il ne pourra affirmer qu’une offre supérieure « chasse » les autres…
Et c’est bien là l’une des plus-value de l’agent immobilier, qui va recueillir toutes les offres, sans en exclure aucune et les soumettre, avec son expertise, à son client.
L’analyse de l’agent immobilier ne se limitera pas au montant le plus élevé mais aussi aux éléments qualitatifs des offres reçues.
Ces éléments, sans être exhaustifs, peuvent aller de la condition suspensive de l’emprunt hypothécaire, en passant par le versement d’une garantie, sans parler du délai entre le compromis et l’acte ou encore d’éléments plus subjectifs tels que le vœu du vendeur de voir son bâtiment « respecté » ou encore de la sensibilité entre les personnes…
L’agent qui aura rencontré les personnes intéressées par l’immeuble, qui aura organisé les visites, pris les renseignements utiles et finalement, aura traité son dossier de manière humaine et professionnelle sera celui qui aura permis au vendeur de trouver le « meilleur » acheteur, non pas au sens strictement financier du terme, mais au sens qualitatif !
Ce faisant, l’agent immobilier n’aura, en aucune façon, enfreint la loi mais aura travaillé au mieux des intérêts de son vendeur et aura également veillé à sécuriser la transaction sans se « limiter » à « adjuger au plus offrant ».
Comparaison n’est donc pas nécessairement raison et les raccourcis ne sont pas toujours les chemins les plus courts….
Illustration: depositphotos
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