« Faire offre à partir de… »: une pratique dangereuse

Publié par Erik Deckers, le 21 septembre 2016 - Blog, Droit, Infos immobilières, IPI

On voit fleurir de plus en plus d’annonces de mises en vente avec la mention « Faire offre à partir de (tel prix)…. » Que faut-il en penser ?

Cela s’apparente à une mise aux enchères.

Or, l’IPI, dans sa newsletter (n° 169 du 21/9/2016) adressée aux agents immobiliers agréés, le rappelle pertinemment:

« Dans une décision rendue ce 9 juin, la Cour de cassation a confirmé que seuls les notaires sont autorisés à vendre aux enchères publiques des biens immobiliers tels que des habitations et terrains. Si la vente a lieu via le site internet d’un établissement de vente aux enchères, elle ne sera pas valide. 

La plus haute juridiction de notre pays a confirmé que les ventes aux enchères ne doivent pas nécessairement se tenir dans une salle. Celles qui sont organisées pour un public rassemblé de manière virtuelle, relèvent également du monopole légal du notaire. Si, par exemple, la vente se fait via un site internet public d’une maison de vente aux enchères spécialisée, le juge devra l’invalider.

Cette décision de la Cour de cassation est l’occasion de rappeler qu’il faut, en tant qu’agent immobilier, être prudent avec certaines techniques commerciales qui peuvent laisser croire au consommateur que c’est l’offre la plus élevée qui l’emporte, comme une enchère. 

Conformément à l’article 50 du Code de déontologie, les agents immobiliers ont l’obligation de transmettre sans retard les offres à leurs commettants. 
Mais indiquer dans les annonces « faire offre à partir de », puis inciter les amateurs à surenchérir peut s’avérer risqué. 

En effet, il n’est pas rare que les assesseurs juridiques de la Chambre exécutive de l’IPI soient saisis de plaintes de consommateurs déçus de ne pas avoir pu acquérir le bien qu’ils convoitaient et qui sont persuadés que ce dernier devait leur revenir car ils ont émis l’offre la plus élevée ou la plus ancienne par exemple.

L’agent immobilier doit toujours attirer l’attention des amateurs qui leur remettent une offre que, sauf mandat, c’est le vendeur qui décide et non l’agent immobilier. Cela signifie que ce n’est pas nécessairement la première offre, la dernière ou la plus élevée qui l’emporte. Car d’autres considérations peuvent intervenir dans le choix du vendeur, comme le fait qu’il y ait ou non une clause suspensive.

L’agent immobilier qui inciterait les amateurs à surenchérir les uns par rapport aux autres doit donc être attentif à bien les informer car, ce faisant, il pourrait leur laisser penser que c’est nécessairement le plus offrant qui l’emportera.
L’agent immobilier doit également veiller à ne pas divulguer le nom des offrants aux autres amateurs. »

J’ajouterai, pour ma part, que le même code de déontologie prévoit en son article 52 : « L’agent immobilier courtier veille toujours à ce que les prix des biens qu’il communique correspondent à ceux convenus avec le commettant. » Il serait surprenant que le contrat de courtage mentionne un prix « à partir de… « !

Par ailleurs, j’ai déjà pu relever que, dans le cadre de mission non exclusives confiées  pour le même bien à deux agences, au prix de, par exemple, 500.000 €: l’une publie légitimement des annonces à 500.000 € et l’autre indique « faire offre à partir de 450.000 € » (ce qui lui permettra de mieux se positionner sur les sites portails): c’est, bien entendu, fausser la concurrence et, à mon sens, déontologiquement répréhensible.

Et, enfin, on a déjà pu lire notamment sur notre site, que même en faisant offre au prix demandé, il n’y a pas nécessairement vente (le propriétaire-vendeur restant libre d’accepter ou non de conclure avec l’offrant). Alors avec des appels du type « faire offre à partir de (n’importe quel prix) », on ne rend service à personne…